The american nightmare

Il est rare que j’évoque autre chose que l’Espagne dans ce blog. Mais certains événements peuvent m’y amener.

Il est vrai également que la situation de l’Espagne « s’est débloquée » comme l’ont dit bon nombre de journalistes et d’observateurs et qu’une coalition (boiteuse) qui a vu se rassembler la droite, le centre droit et la gauche socialiste a permis la mise en place d’un gouvernement homogène de droite. « L’Espagne est gouvernée », disent-ils, et peu importe comment. Nous vivons un temps de coalitions improbables, nouvelle passion de ceux qui ne tarissaient pas de louanges pour l’alternance. Le monde politique des pays d’Europe se rétrécit de plus en plus… et certains soutiens montrent que le lien existe entre l’abstention socialiste et le succès de Trump. Et il y a des soutiens qui  plombent.

Je reviens à ce « cauchemar » que j’évoque dans le titre de cette note.

J’assistais avant-hier à un acte universitaire (une cérémonie d’hommage rendue à un ancien collègue et ami très proche) dans une université proche de mon domicile. J’ai vu tous mes anciens collègues et de nombreux autres arriver le matin en faisant état de leur incompréhension, de leur colère, de leur indignation, de leur peur aussi, alors qu’ils venaient d’apprendre l’élection de Donald Trump à la Présidence des USA. Il y avait comme un bruissement de catastrophe à venir dans les échanges matinaux entre participants et publics… Le cauchemar s’était réalisé.

Diosn en un mot que les médias y sont pour beaucoup avec leurs couvertures exceptionnelles de l’événement. Ce n’est plus le Président des Etats-Unis que l’on élit quand El Pais envoie une vingtaine de journalistes pour en rendre compte.

Alors réfléchissons. Trump est-il un fasciste, un Mussolini d’outre-Atlantique, un misogyne obtus, que sais-encore? Oui, très certainement tout ceci à la fois et également un faiseur, un entrepreneur ayant bénéficié de toutes les largesses que la loi lui a permis pour s’enrichir sur le dos des fonds publics. Il est un vrai produit américain, le moins reluisant, mais authentiquement américain. Il suffit de lire Jack London, Sinclair Lewis pour comprendre que le « It can’t happen here » n’a jamais eu aucun sens. Tout peut arriver partout. Mais toujours habillé d’un fond local de postures, de langage et de concepts.

Les Etats-Unis sont-ils « une grande démocratie »? Il suffit de se pencher un tant soit- peu sur leur système électoral pour comprendre que cette démocratie a un parfum désuet  d’ancien régime. Les règles du « winner take all », du choix dans chaque Etat de grands électeurs cadenassent les choix et permettent même à un candidat qui n’aurait pas obtenu la majorité des voix des votants de premier de gré d’être élu. C’est le cas de Trump, mais ce fut le cas de bien d ‘autres présidents. Le taux d’abstention a été élevé, mais ce n’est pas une surprise.

Aujourd’hui on entend toutes ces critiques (système archaïque, injuste, Etat théocratique,…) alors que si on les avait développées au moment de l’élection d’un président différent, plus dans la norme, on aurait été taxé antiaméricain primaire celui qui les proférait.

Oui, les Etats-Unis sont un cas unique dans le monde. Tout d’abord il s’agit d’un Etat qui n’a pas de nom et a, comme toutes les puissances coloniales au XIXe siècle, par la guerre ou les traités, agrandi son territoire (oui, on voit bien la Russie depuis les côtes de l’Alaska qui fut possession russe jusqu’en 1867). Ses limites ne sont donc pas définies et il est vrai que sa capacité d’extension en matière de lois est unique mais liée à ces mêmes critères territoriaux.

Ceci dit, il est bien commode de critiquer un résultat électoral américain quand il ne nous convient pas. Les conditions de sa réalisation sont celles que prévoit la loi américaine et Trump n’est pas (encore) Pinochet.

Léonrard Cohen est mort, il n’aura jamais le Nobel de littérature.

Il aurait pu prononcer à Stockholm les mêmes mots que ceux qu’il prononça en 2011 en recevant le prix Principe de Asturias.

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